Après de nombreuses critiques contre le « dérapage » du budget des collectivités, le projet de loi finances propose 5 milliards d’économies directes. Une somme qui a dû mal à passer.
« La reprise en main des budgets locaux par l’État est inacceptable. Ces mesures budgétaires menacent les services publics. Les Français les plus fragiles seront les premiers à en faire les frais. » Les mots ne sont pas ceux d’un membre du Nouveau front populaire, mais de Sébastien Martin, président de l’association Intercommunalités de France, une association de collectivités locales, et président de Grand Chalon Agglomération.
L’homme politique est un ancien des Républicains, proche de Xavier Bertrand. Une couleur politique pas si éloignée du gouvernement de Michel Barnier. Pourtant, il tape fort. Des mots reflet du rejet total du monde des collectivités locales face aux mesures présentées dans le projet de loi des finances (PLF) : un effort de 5 milliards est demandé aux différentes collectivités, départements, régions, communes, etc, qui disposent de larges compétences, de l’urbanisme, l’environnement et la gestion des écoles pour les communes aux transports non urbains et au développement économique pour les régions. « Les intercommunalités de France se doivent de refuser les mesures budgétaires que l’État entend leur imposer dans le projet de loi de finances pour 2025 » assène aussi Sébastien Martin, au cours de la convention de son association.
Les rapports sont compliqués depuis des années entre le gouvernement et les collectivités locales, ce qui explique aussi ces réponses très vives. En septembre, avant de quitter le ministère de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire avait même pointé la responsabilité des collectivités dans le « dérapage » du déficit public du fait de l’augmentation de leurs dépenses de fonctionnement, des mots aussitôt contredits par nombre d’élus locaux. La Cour des comptes a de son côté proposé dans un rapport publié début octobre la surpression de 100 000 postes de fonctionnaires territoriaux. La saignée était donc attendue.
Mais les détails inquiètent tout de même. Sur ces 5 milliards d’euros d’économies demandées, le PLF prévoit un gel de dotations aux collectivités les mieux fournies à hauteur de 3 milliards d’euros, qualifié « d’impôt direct de l’État sur le budget des collectivités locales » par Sébastien Martin. Au total, cela devrait concerner 450 grandes collectivités. Une mesure censée épargner les collectivités les plus fragiles, notamment certains départements, mais qui ne convainc pas grand monde.
Surtout, l’impact de ce PLF est plus important que ces seuls 5 milliards annoncés. « De nombreuses annulations de crédits auront des conséquences négatives pour les services publics au quotidien et pour l’investissement » s’inquiète sur la radio RCF Murielle Fabre, vice-présidente de l’Association des maires de France. Un constat à mettre en perspective avec la place de premier investisseur public des collectivités locales. Selon un rapport de l’inspection générale des finances, 58 % des investissements passent par les collectivités.
La baisse de dotation du fonds vert, dédié au financement de la transition écologique des collectivités, pourrait donc, entre autres, être particulièrement douloureuse. Le PLF propose que ce fonds passe de 2,5 milliards d’euros à 1 milliard. Alors même qu’il y a quelques mois, un autre rapport de l’Inspection générale des finances assurait que les collectivités n’investissent pas assez dans l’adaptation au dérèglement climatique et à la réduction des gaz à effets de serre.