Une récente étude de la Drees atteste d’une forte hausse des arrêts maladie entre 2010 et 2023 mais aussi du montant des indemnités, évalué à 10,2 milliards d’euros l’an dernier. Un lourd budget pour la Sécurité sociale, que le gouvernement a tenté d’alléger dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), rejeté par le Parlement début décembre.
Un peu plus de 10 milliards d’euros. C’est ce qu’ont coûté les indemnités journalières (IJ) versées en cas d’arrêts maladie pour les salariés du privé et contractuels de la Fonction publique en 2023 selon une étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) parue vendredi 13 décembre.
Une flambée des arrêts maladie et de leur coût depuis une décennie
Un montant qui n’a cessé de grimper depuis 2019 et le début de la crise sanitaire avec une hausse moyenne de 6,3 % par an, détaille la Drees. En cause ? Une hausse du nombre d’arrêts maladie depuis 2010 provoquée notamment par le vieillissement de la population active, par “l’exposition à certaines pénibilités physiques” ou de “contraintes psychosociales”, avancent les auteurs de l’étude. Mais cette augmentation du coût des indemnités journalières serait aussi liée aux revalorisations successives du Smic depuis 2021 dues à l’inflation grimpante.
Des arrêts financés par la Sécurité sociale, les entreprises et particuliers
Pour rappel, l’Assurance maladie indemnise les salariés au-delà de 3 jours d’arrêt maladie (le délai de carence durant lequel l’intéressé ne perçoit aucune indemnité). Pour cela, elle rémunère le salarié sur la base de 50 % du salaire brut calculé sur les 3 derniers mois de salaire dans la limite de 1,8 fois le Smic, soit 3 243,24 € bruts par mois. Toutefois, les conventions collectives de certaines entreprises prévoient un maintien du salaire brut intégral. Par ce système dit de “subrogation”, les entreprises touchent les indemnités de l’Assurance maladie à la place du salarié et verse un complément de salaire.
Ces indemnités versées par la branche maladie de la Sécurité sociale sont financées à 56,4 % par les cotisations sociales et patronales et à 20 % par la contribution sociale généralisée (CSG). Viennent ensuite les contributions sociales, publiques et autres revenus, pour des recettes s’élevant au total à 600 milliards d’euros.
Le “trou de la Sécu” se creuse dangereusement
Le déficit de la Sécurité sociale n’est pas nouveau. Appelé familièrement “trou de la Sécu”, les recettes ne parviennent plus à le combler, malgré une nette amélioration depuis la crise Covid. Celui-ci a en effet été ramené à 10,8 milliards d’euros en 2023, soit 4 fois moins que le déficit de 39,7 milliards d’euros constaté en 2020.
Faute de recettes suffisantes, le déficit est tout de même resté supérieur de 2,1 milliards d’euros par rapport aux prévisions de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) adoptée en décembre 2023. Cet écart entre les prévisions et le résultat s’est davantage creusé cette année. En 2024, le déficit devrait ainsi atteindre 18 milliards d’euros, soit 7,5 milliards de plus que le montant initialement prévu.
Selon une communication de la Cour des comptes envoyée à l’Assemblée nationale et au Sénat en octobre dernier, cet écart “sans précédent” aurait été le fruit de méthodes d’anticipation budgétaires erronées conjuguées à une mauvaise maîtrise des dépenses, notamment des soins de ville. Du côté de l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) par exemple, le budget a atteint 1,2 milliards contre 500 millions d’euros initialement prévus.
Des mesures concentrées sur la lutte contre la fraude et la baisse des indemnités
La Cour des comptes saluait toutefois les efforts du Gouvernement pour ramener le déficit de la Sécurité sociale à 16 milliards en 2025 via plusieurs mesures présentées dans le PLFSS pour 2025. Celui-ci – rejeté le 2 décembre en commission mixte paritaire – prévoyait une diminution des dépenses de l’Ondam notamment via l’abaissement du plafond de remboursement des arrêts maladie de 1,8 à 1,4 fois le Smic, soit de 52,28 € à 41,44 € bruts par jour, pour une économie de 600 millions d’euros.
Outre ces possibilités, la Cour des comptes mettait en avant dans son rapport publié en mai dernier la possibilité d’augmenter la durée de carence de 3 à 7 jours ou encore la fin de l’indemnisation des arrêts de travail de moins de huit jours. Avec la chute du Gouvernement et l’abandon du PLFSS, reste à savoir ce que proposera le nouveau Gouvernement une fois constitué.
Elle insiste tout aussi bien sur la nécessité de lutter contre la fraude aux arrêts ou les coûts des indemnités. Plusieurs études choisissent cependant de se concentrer davantage sur les causes notamment sur l’augmentation des troubles liés à la santé mentale depuis la crise sanitaire. Selon l’observatoire de l’absentéisme de l’assureur Axa, Datascope, les troubles psychologiques représentaient la première cause des arrêts de travail de longue durée en 2022, surtout chez les jeunes.